Lettre au Préfet de l’intersyndicale départementale des organisations de retraité.e.s du 93 CGT, FO, FSU, FGR-FP et LSR

Intersyndicale départementale des organisations de retraité.e.s du 93 CGT, FO, FSU, FGR-FP et LSR

 Bobigny, le 22 avril 2020

A Monsieur le Préfet de Seine-Saint-Denis

Monsieur le Préfet, 

Nos organisations de retraité.e.s CGT, FO, FSU, FGR-FP et LSR de Seine-Saint-Denis s’adressent à vous solennellement pour vous faire part de leurs plus vives inquiétudes concernant les conséquences de la crise sanitaire liée à l’épidémie du COVID-19 en particulier sur les personnes âgées, et de la crise sociale qui se profile.

Une situation qui nous scandalise : 

Depuis le début de l’épidémie, le gouvernement annonce que le matériel de protection du personnel et des malades arrive dans les hôpitaux et les EHPAD. Le 30 mars, le décès de la directrice des soins de l’hôpital de Montfermeil, du coronavirus selon l’ARS, confirmait l’urgence de protéger le personnel hospitalier. Malgré les informations de ces derniers jours, les infirmiers et infirmières, aides-soignants, médecins, lancent chaque jour des cris d’alarme.

Fin mars, le ministre de la santé a annoncé une vaste opération de dépistage dans les EHPAD, au moindre signe de contagion. Cette mesure nécessite aussi des moyens de protection en nombre suffisant pour les personnels et pour les résidents. Cela implique que masques, gels hydro alcooliques, blouses, soient fournis de toute urgence, et que les établissements disposent d’une quantité suffisante de tests.

Nous demandons que l’ensemble des EHPAD bénéficie de ce dépistage et nous souhaitons connaître les instructions données aux établissements.

Quelles assurances pouvez-vous nous donner quant à la fourniture du matériel de protection et à la disponibilité des tests?

Il aura fallu attendre le 2 avril pour que les décès des personnes âgées résidant en établissement soient pris en compte dans le suivi de la crise sanitaire. Cette discrimination qui révèle un mépris à l’égard de cette catégorie de population nous indigne !

Quelles sont les priorités ? 

Sauver des vies humaines est le plus urgent et la production de certains biens matériels peut être différée.

Il importe d’assurer la protection des salariés de notre département obligés de se déplacer pour travailler à faire fonctionner la société dans son ensemble.

La protection des populations non confinées – sans-abris, sans papiers, demandeurs d’asile – relève aussi de l’urgence, et la réquisition des logements vides, la règle.

La protection des populations âgées sur leurs lieux d’habitation ou en EHPAD, des personnes en situation de handicap, en hôpital psychiatrique, celle vitale des aides à domicile et des personnels soignants est urgente.

Les populations âgées, « personnes à risques » 

Dans les EHPAD, les établissements de soins, dans les sociétés de services à la personne qui organisent le maintien à domicile des personnes dépendantes, les familles et les personnels s’inquiètent, et la peur, légitimement, les saisit. Ils sont conscients que si l’épidémie se développe, ce sera, et c’est déjà probablement, une véritable catastrophe.

Les conditions de vie en EHPAD sont fortement dégradées (solitude des personnes assignées dans leur chambre, sans visite ni contact, sans plus d’animations, rythme des services et des soins ralenti). Les représentants du personnel ne sont ni consultés, ni informés des modifications de l’organisation du travail. Les établissements sont laissés à l’improvisation pour tenter de réduire les effets du confinement. Quelles instructions et quels moyens sont donnés pour permettre d’entretenir des contacts avec la famille, qui ont souvent un caractère vital ?

Le manque criant de personnel dans les EHPAD et services de santé, déjà vivement dénoncé avant la crise, parce qu’il pouvait conduire à de la maltraitance institutionnelle, est aujourd’hui aggravé et difficilement soutenable, d’autant que des soignants sont aussi malades, en quarantaine et non remplacés.

Nous exigeons dès maintenant la mise en place d’un plan de recrutement de personnels qualifiés pour atteindre le ratio d’un soignant pour un résident, alors qu’actuellement il est de 0,2. 

Des exigences à la hauteur de l’urgence et de la gravité de la crise : 

La générosité et le dévouement sont des valeurs nobles mais elles ne sauraient se substituer au rôle de l’Etat qui doit garantir la continuité et qualité du service public de santé en priorité.La qualité d’une politique publique se mesure à l’aune du sort réservé aux plus fragiles. Quelles sont vos actions pour assurer la vie et la santé des personnes les plus âgées, des personnes les plus exposées aux risques épidémiques ?

Nos revendications sont évidentes. 

Invoquer la solidarité, le « vivre ensemble », applaudir et féliciter le personnel soignant pour son courage ne suffit pas. Les personnes âgées doivent être protégées.

Dans les EHPAD, mais aussi à l’hôpital et partout où les protections manquent cruellement, c’est la vie des personnels, de leurs familles, celle des patients, des résidents d’EHPAD, des personnes dépendantes isolées à domicile, qui est en jeu.

Il est de votre responsabilité que toutes les structures de soins et médico-sociales soient dotées immédiatement des protections indispensables : gel hydro alcoolique, gants, masques… et que des tests en nombre suffisant puissent être réalisés partout notamment dans les structures accueillant des personnes âgées. C’est une urgence absolue. 

Comment éviter la contamination des plus fragiles alors que les personnels utilisent les transports en commun pour se rendre à leur travail ? Si le confinement est effectif, les salariés qui travaillent viennent toutefois de l’extérieur et sont donc potentiellement contaminants. Être soignant et à la fois source d’épidémie mortelle est évidemment une charge morale impossible à tenir longtemps. Tout doit être mis en œuvre pour que ces personnels travaillent sereinement auprès des personnes dont ils ont la responsabilité. Quel dispositif protecteur mettez-vous en œuvre pour limiter les risques de contamination extérieure ? L’accès gratuit au transport par taxi ?

Conformément à la loi du 30 juin 2004, nous vous demandons de garantir la mise en œuvre du Plan d’alerte et d’urgence dans toutes les communes du département, ce qui est de votre responsabilité. Il faut que les besoins de toutes les personnes âgées et personnes en situation de handicap soient bien identifiés, qu’elles aient un numéro d’urgence à appeler en cas de besoin et que le portage de courses, de repas et/ou des médicaments leur soit bien proposé.

Cette pandémie révèle au grand jour les conséquences des politiques de santé menées depuis des années au nom de la réduction des déficits publics et des économies budgétaires : des milliers de lits ont été fermés en 20 ans dans les hôpitaux.

En Seine- Saint-Denis, les capacités d’hospitalisation des malades du COVID-19 étaient déjà saturées le 30 mars, le département disposant d’un faible nombre de lits d’hôpital.

Notre département souffre d’ailleurs particulièrement du manque d’équipements et de personnels de santé. La comparaison avec Paris est criante (source : DREES 2017).

Paris : 2,2 millions d’habitants. 6 GHU, 77 lits pour 10 000 habitants, 16 859 généralistes.

Seine-Saint-Denis : 1,8 millions d’habitants. 1 GHU, 42 lits pour 10 000 habitants, 3 878 généralistes.

Nous avons été aux côtés des personnels des EHPAD et des services à domicile pour soutenir leurs mobilisations et revendications, comme nous soutenons celles des personnels hospitaliers.

Monsieur le Préfet, vous êtes le représentant de l’Etat en Seine-Saint-Denis, il vous appartient de prendre toutes les décisions maintenant pour protéger nos concitoyens, les personnes vulnérables, les professionnels indispensables à la vie collective. Notre démarche doit retenir toute votre attention. 

Nous vous prions d’agréer, monsieur le Préfet, l’expression de notre considération.

USR-CGT 93   FO 93   SFR-FSU 93    FGR-FP 93      LSR 93

 

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